Le mois de septembre est (déjà!) de retour et avec lui la farandole effrénée des parutions de la sempiternelle rentrée littéraire française.
Bon, que je sois honnête, le cru 2010 est moins pire que les deux ou trois dernières années certes, mais y’a tout de même pas de quoi casser trois pattes a un canard.
Tour d’horizon des prochaines lectures de Yannick et Francis.
Alors, du côté des bonnes surprises pour mon petit mari nous avons:

Un nouveau Eric-Emmanuel Schmitt, son second livre CD, au titre ma fois plutôt drôle, «Quand je pense que Beethoven est mort alors que tant de crétin vivent», roman précédé de «Kiki Van Beethoven».
Résumé:
«Quand je pense que Beethoven est mort alors que tant de crétin vivent»Schmitt : surpris, il se rappelle l’avoir aimé passionnément pendant son adolescence. Pourquoi ne l’écoute-t-il plus ? Pourquoi n’a-t-il plus eu besoin de sa passion, sa véhémence, sa noblesse ? Réfléchissant à partir de sa propre vie, Schmitt médite sur notre époque qui ne croit ni en Dieu ni en l’homme, où l’individu se sent broyé et inutile. Il ausculte notre temps désespéré que l’idéal de grandeur a quitté Un essai brillant et intime, fait d’émotions, de surprises et d’émerveillements –où Schmitt élucide ce génie, créateur d’une « messe pour l’humanité », un homme infirme, seul, malheureux, accablé par le sort, qui écrit pourtant une oeuvre énergique couronnée par un hymne à la Joie. Comment peut-on avoir le sens du tragique et se montrer optimiste ? Tel sera le défi pour notre siècle ; tel est le message de Beethoven : il nous propose une philosophie et une morale humaniste dont nous avons un urgent besoin.
«Kiki Van Beethoven»: Un masque de Beethoven, découvert par hasard dans une brocante, va changer la vie de Kiki, la soixantaine rayonnante, ainsi que celle de ses trois amies. Une fable sur la jeunesse perdue, les émotions refoulées, les secrets ensevelis. Grâce à la musique de Beethoven qui sert de clé, les quatre femmes vont ouvrir des portes intérieures essentielles, celles qui les coupaient de leur véritable histoire, celles qui les protégeaient de leurs chagrins ou de leurs sentiments.
Un texte drôle, original, émouvant qui passe élégamment du rire aux larmes.
La force de Beethoven s’adjoint à la poésie de Schmitt pour créer une oeuvre insolite qui célèbre l’humanisme, le courage. Un véritable Hymne à la Joie.

Le nouveau roman de Philippe Claudel, l’auteur favori de Yannick depuis quelques années, «L’enquête», qui m’a l’air ben dark et ben weird.
Résumé: « C’est en ne cherchant pas que tu trouveras. » Comment l’Enquêteur du nouveau roman de Philippe Claudel aurait-il pu s’en douter ? Comment aurait-il imaginé que cette enquête de routine serait la dernière de sa vie ? Chargé d’élucider les causes d’une vague de suicides dans l’entreprise d’une ville qui ressemble hélas à toutes les nôtres, l’Enquêteur est investi d’une mission qu’il doit mener à terme comme il l’a toujours fait. Des signes d’inquiétude s’emparent de lui peu à peu : l’hôtel où il s’installe accueille tantôt des touristes bruyants et joyeux, tantôt des personnes déplacées en détresse. Dans l’entreprise où il devrait être attendu afin de résoudre son enquête, personne ne l’attend et tous lui sont hostiles. Est-il tombé dans un piège, serait-il la proie d’un véritable cauchemar ? On l’empêche de boire, de dormir, de se nourrir, on ne répond jamais à ses questions que par d’autres questions. Le personnel même est changeant, soit affable soit menaçant. À mesure qu’il avance dans ses découvertes, l’Enquêteur se demande s’il n’est pas lui-même la prochaine victime d’une machine infernale prête à le broyer comme les autres. On devine ainsi que l’impuissance de l’Enquêteur à clore son enquête reflète notre propre impuissance face au monde que nous avons construit pour mieux nous détruire.

Et finalement, la parution du nouveau Bret Easton Ellis en francais, «Suite(s) Impériale(s)», et la réédition en grand format de son premier livre, «Moins que zéro».
Résumé: C’est dans une Los Angeles évanescente, peuplée de fantômes et d’hallucinations, que Clay, le protagoniste de «Moins que zéro», revient passer les vacances de Noël. Un quart de siècle s’est écoulé et la chirurgie esthétique a rendu la plupart de ses anciens amis méconnaissables. Le cinéma, qui l’emploie comme scénariste, paraît une copie de plus en plus délavée de la réalité et la réalité elle-même, un mauvais film dans lequel chaque personne rencontrée compte sur lui pour obtenir un rôle. Clay pense qu’une fille, une seule, Rain Turner, a peut-être ses chances.
Au milieu d’une nuit de cauchemar, deux mots apparaissent sur le miroir d’une salle de bain : « Disparaître ici. » Vingt-cinq ans plus tôt, ces mêmes mots se déployaient sur un panneau publicitaire de Sunset Boulevard.
Un matin, des étudiants découvrent près d’une poubelle ce qu’ils imaginent être un drapeau américain trempé de sang. C’est en fait un cadavre.
À la fin d’un week-end de drogues et d’orgie à Palm Springs, une fille, sans doute la doublure de Rain, contemple une montagne au-delà de la plaine désertique et murmure : « C’est le lieu du passage. » Elle ajoute en pointant le doigt : « C’est ici que vit le diable. »
De mon côté, agréable surprise, ce sont bien cinq livres qui m’intéressent dans le flot des quelques centaines d’ouvrages qui s’en viennent en septembre (ça change des deux habituels, surtout qu’il n’y a même pas de Dantec cette année!)

Bon, le Nothomb de l’année évidement, «Une forme de vie», au résumé lapidaire (« Ce matin-là, je reçus une lettre d’un genre nouveau. ») et à la couverture flashy la mettant une fois de plus en scène.
Dans ce dix-neuvième roman Amélie Nothomb nous raconte ses échanges épistolaires passionnés avec un G.I retenu en Irak. Réfugié dans la nourriture pour échapper à un quotidien fait d’horreur et d’ennui (il invente le pacifisme par l’obésité!), le soldat américain décide d’écrire à Amélie Notomb, qui, selon lui, le comprendra. Nothomb s’inspire aussi de sa volumineuse correspondance avec ses admirateurs (elle affirme avoir 2000 correspondants et écrire huit lettres par jour) et de l’aspect parfois blessant de celle-ci.
Probablement un autre pétard mouillé et deux heures de lectures maximum, mais bon, j’ai lu tous les autres…

Le troisième volume des délectables aventures de Joséphine de Pénélope Bagieu«Change de camp». De la BD française au féminin de haut vol. On rit, mais intelligemment, même si ça reste léger. Un petit bonheur.
Résumé: Joséphine a toujours « la trentaine », n’est toujours pas mariée, et n’a toujours pas d’enfant. Gaffeuse et complexée par ses hanches, l’héroïne de Pénélope Bagieu qui nous ressemble tant vit toujours avec son chat Bradpitt, mais elle ne dort plus avec toutes les nuits…
La voici désormais dans le camp des « maquées » !
Criant de vérité et drôle à souhait, le couple du XXIe siècle subit jour après jour ses petits tracas qui animent la vie. Le tout avec un splendide savoir-faire, des situations évocatrices et cocasses. Dessin simple et expressif, d’une fraîcheur et d’une vitalité irrésistible, Pénélope Bagieu signe avec ce tome 3 une trilogie délicieuse !

Un nouveau roman de Virginie Despentes«Apocalypse bébé», annoncé comme génial (il parait aussi que le manuscrit battait des records en terme de fautes d’orthographe, avant corrections…) À voir, car avec elle rien n’est garanti (sa traduction d’un texte de Poppy me laisse encore un goût amer dans la tête).
Résumé: Valentine Galtan, adolescente énigmatique et difficile, a disparu. La narratrice, Lucie, anti-héroïne trentenaire, détective privée sans conviction ni talent engagée par la grand-mère de Valentine pour surveiller ses faits et gestes, l’a perdue sur un quai de métro parisien. Comment la retrouver ? Que faire des édifiantes photos de Valentine qui la montrent si expérimentée avec les garçons ? Aurait-elle rejoint sa mère, qu’elle n’a jamais connue, à Barcelone ? Le mieux pour Lucie serait de faire équipe avec la Hyène, une « privée » aux méthodes radicales, une femme puissante, au corps souple, plein d’une violence qui s’exprime par saccades : moyennant finances, et aussi par amusement, La Hyène accepte le marché. Voici les collègues mal appariées, l’une lesbienne volcanique, l’autre hétéro à basse fréquence, qui traversent la France et l’Espagne jusqu’à Barcelone à la recherche d’une petite fugueuse, une gosse mal grandie, une fille de la bourgeoisie qui finira – on ne vous en dit pas plus – par rejoindre le camp des irréductibles.

Road-book, comme il y a des road-movies, portraits d’êtres blessés, traversée des différentes couches sociales – la bourgeoisie cultivée, botoxée et peureuse, les cités rebelles qui croient à l’avenir de l’Islam néolibéral, les radicaux de gauche ou de droite en imposteurs, les back-rooms lesbiens – ce roman particulièrement maîtrisé de Virginie Despentes fait dialoguer la forme du polar contemporain avec la satire sociale la plus corrosive. Et, étrangement, comme passée en contrebande, résonne une tendresse pour toutes les Valentine, ces adultes cousus d’enfance qui paient pour nos fautes.

LE chouchou et LE livre de cette rentrée, qu’on l’aime ou qu’on l’haisse, c’est bien évidemment le Houellebecq nouveau, «La carte et le territoire». J’ai hâte.
Résumé: Cinq ans après «La possibilité d’une île»Michel Houellebecq revient avec un grand roman qui raconte la vie de trois personnages masculins.
Certains y verront un retour aux thèmes d’«Extension du domaine de la lutte» et des «Particules élémentaires», d’autres salueront un texte puissant, à la fois contemporain et profondément classique, d’une admirable maîtrise littéraire.
Si Jed Martin, le personnage principal de ce roman, devait vous en raconter l’histoire, il commencerait peut-être par vous parler d’une panne de chauffe-eau, un certain 15 décembre. Ou de son père, architecte connu et engagé, avec qui il passa seul de nombreux réveillons de Noël.
Il évoquerait certainement Olga, une très jolie Russe rencontrée au début de sa carrière, lors d’une première exposition de son travail photographique à partir de cartes routières Michelin. C’était avant que le succès mondial n’arrive avec la série des « métiers », ces portraits de personnalités de tous milieux (dont l’écrivain Michel Houellebecq), saisis dans l’exercice de leur profession.
Il devrait dire aussi comment il aida le commissaire Jasselin à élucider une atroce affaire criminelle, dont la terrifiante mise en scène marqua durablement les équipes de police.
Sur la fin de sa vie il accédera à une certaine sérénité, et n’émettra plus que des murmures.
L’art, l’argent, l’amour, le rapport au père, la mort, le travail, la France devenue un paradis touristique sont quelques-uns des thèmes de ce roman, résolument classique et ouvertement moderne.

Et , pour finir, mon autre chouchou de cette rentrée littéraire, la traduction française du nouveau roman de Sarah Waters«L’indésirable». Déjà sorti chez nous (en librairie depuis cette semaine) par les éditions Alto avec une couverture bien plus belle que celle de l’édition française (chez Denoël). À noter d’ailleurs que les 300 premières copies du livre chez Alto sont en format relié, avec pages coupées à l’ancienne. Un petit bijou soigné qui donne le goût d’être lu. D’ailleurs, c’est ce que je suis en train de lire…
Résumé: Hundreds Hall n’est plus que l’ombre de lui-même; depuis longtemps les glaces ternies ont cessé de refléter ces fêtes qui animaient le manoir au temps de sa splendeur. Victime elle aussi des ravages de la Seconde Guerre mondiale et des tensions qui déchirent le tissu social de l’Angleterre, la famille Ayres, qui habite Hundreds depuis des générations, est abandonnée à son triste sort. Malgré la débâcle, la mère tente de cacher son infortune tandis que le fils, blessé au combat, peine à assurer la relève, aidé par sa sour, Caroline, une femme vive et indépendante.
Venu un jour s’occuper d’une domestique souffrante, le docteur Faraday, qui a connu enfant la belle époque du manoir, se lie bientôt d’amitié avec la famille. Il sera avec elle témoin d’une succession d’événements de plus en plus effrayants. Se peut-il que les Ayres, hantés par les souvenirs d’une vie révolue, soient aussi tourmentés par une autre présence rôdant dans les corridors de Hundreds Hall?
Subtil mélange de fresque familiale, de roman social et de suspense gothique, le cinquième ouvrage de Sarah Waters, finaliste au prix Booker, vient confirmer d’éclatante manière le formidable talent d’une romancière ensorcelante.

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