L'apostasie

L'apostasie

Voici un guide pratique sur l’apostasie. Dans la tête de bien des gens, le baptême, la confirmation et le mariage (surtout le mariage) sont des sacrements qui nous marquent à vie. Nulle possibilité d’effectuer un retour en arrière. Évidamment, ce n’est pas le cas. Plusieurs personnes ont obtenue des nullités pour leur mariage après avoir passé par une démarche fort longue. Mais depuis quelques temps, il semble que certaines personnes ont appris un nouveau mot. Ce mot leur paraît en être un de délivrance : Apostasie.

Ici, une définition s’impose :

« Défini par la bulle pontificale Gratia Divina (1656), l’apostasie est le reniement de la foi et des principes de la foi catholique, des valeurs bibliques et évangéliques, des dogmes et des traditions et articles de foi reconnus par l’Église et les conciles, les enseignements des Pères de l’Églises ordinaires du magistère. Le Cathéchisme de l’Église catholique déclare que quiconque quitte en connaissance de cause la religion catholique est en état de péché mortel. »

Wikipédia

(Il y a fort à parier que si vous pensez à l’apostasie, l’état de péché mortel ne vous fait pas un pli. Mais au fait comment ça marche l’apostasie?)

Au Québec, il semble que l’apprentissage de ce mot soit passé par le mouvement raélien. On a entendu parler de cette religion soucoupiste qui va dans les école et demande à des jeunes de poser un geste d’apostasie (ex : brûler ou déchirer un papier sur lequel figure la croix, symbole du christianisme). Les raéliens ont aussi développé un site internet qui vous propose un formulaire à remplir pour accomplir votre apostasie comme par magie.

En effet, cela pourra vous permettre d’accomplir le geste, mais serez-vous allé au bout de votre démarche? Aurez-vous dit ce que vous aviez à dire? Pas nécessairement puisque le formulaire ne vous permet que de dire « en date du … j’apostasie ». On peut trouver mieux comme démarche. Et de plus, si vous ne voulez pas appartenir au mouvement raélien, il ne sert à rien d’envoyer leur formulaire à l’Archevêché pour signaler votre intention d’apostasier.

Le problème de l’apostasie

Dans un contexte où la pratique religieuse n’est plus ce qu’elle a été et où un grand nombre de gens se disent écoeurés par « la religion » (ex : les déclarations du Pape, les cas d’agressions sexuelles qui refont surface, la position de l’Église face aux femmes, aux homosexuels, le refus de reconnaître le condom dans une ère ou surgit le SIDA.

Il est à noter que ce qui est reproché ici, s’attache bien plus souvent au clergé, la structure humaine qui contrôle l’Église qui est l’assemblé de tous les chrétiens). Bref, dans les propos de bien des gens, il semble qu’ils en aient marre des déclarations, des décisions ou de l’immobilisme de ce clergé.

Or, comme on le voit dans la définition citée plus haut, il est impossible de séparer des concepts aussi différents que clergé, foi, Église, valeurs etc. Certaines personnes ne croient pas à l’infaillibilité de l’Église et de son (ses) représentant (s) mais adhèrent aux valeurs véhiculées par les Évangiles et ont une foi basée sur un Dieu tel que présenté dans cette structure religieuse. L’apostasie dans ce cas peut sembler plus difficile puisqu’elle demande un rejet entier.

D’autres personnes vont adopter une foi développée sur des concepts totalement différents à ceux véhiculés par leur Église de baptême. Dans ce cas-ci, l’apostasie pose beaucoup moins de questionnements puisqu’il est probablement moins difficile de rejeter une foi en désaccord à nos croyances les plus profondes.

On pourra alors de diriger vers une autre Église dont les dogmes répondent à nos besoins ou y aller par soi-même et se développer une spiritualité personnelle. Ici, le monde des possibles est ouvert.

Comprendre la paperasserie

Dans la religion catholique-romaine, l’acte de baptême fait foi de tout. Ainsi, lorsque vous êtes baptisés, des informations sont entrées dans un registre paroissial l’année où vous avez été baptisés (Nom de l’enfant, nom des parents, lieu et date de naissance, date du baptême, nom du parrain et de la marraine et les signatures).

Ces registres se trouvent dans les paroisses et une copie est conservée à l’Archevêché du Diocèse auquel appartient la paroisse.

Ainsi, lorsque vous vous faites confirmer, la paroisse qui accomplit ce sacrement se doit d’envoyer un papier à votre paroisse de baptême afin d’inscrire la confirmation dans le registres. Idem pour le mariage.

En envoyant une demande d’apostasie à votre Archevêché, celui-ci devra faire une annotation marginale à votre registre de baptême et il envoie un papier demandant à votre paroisse de baptême d’inscrire l’apostasie dans la marge de votre inscription de sacrement du baptême. Ainsi, il sera inscrit que vous avez « apostasié à la foi catholique par écrit en date du … ».

Si plus tard, une personne ayant apostasié décide de se marier religieusement, elle ne pourra pas puisque lors de l’enquête pré-nuptiale, le prêtre doit demander un certificat de baptême récent aux époux.

Il en va de même pour la personne déjà mariée religieusement, l’inscription de son premier mariage apparaît sur son certificat de baptême.

En bref, les registres se trouvant dans les paroisses et ceux qui sont conservés à l’Archevêché doivent être identiques. C’est ce qui explique que vous devez vous adresser à votre Archevêché pour que votre apostasie soit inscrite. L’archevêché ayant pris connaissance de votre demande, devra contacter votre paroisse de baptême pour qu’elle ajoute l’annotation marginale.

En prime

Plusieures personnes ayant posé le geste d’apostasie se sont plaint des longueurs administratives d’une telle démarche. Il est vrai que tout ne se déroule pas instantanément.

Bien souvent, le personnel en charge à l’Archevêché tentera de vous contacter, à moins que ce ne soit vous qui les contactiez pour savoir où en est-on rendu dans votre demande. On vous proposera de rencontrer d’autres chrétiens qui pourront vous faire témoignage de leur vécu.

Cette démarche doit se dérouler en toute liberté. Il se peut que le fait de vous faire proposer de telles rencontres vous irrite au plus haut point. Il y a souvent une urgence d’agir chez les gens qui entreprennent une telle démarche. Sachez que vous êtres libres d’y aller ou non.

D’autres personnes se sont fait dire que le fait de dire à leur entourage et de renoncer «dans leur cœur » à la foi catholique est un acte d’apostasie en soi… C’est vrai, mais c’est un peu faire les choses « à la Raël » et déchirer une feuille de papier avec une croix dessinée dessus… ou un pape! L’annotation marginale sur l’acte de baptême fait foi de l’acte d’apostasie.

L’importance de la démarche?

L’apostasie est un geste d’importance. Comme tout geste important, il faut premièrement s’arrêter aux raisons qui nous feraient accomplir un tel geste avant de le poser. Il faut bien sûr faire le tri dans vos idées. Vous demander pourquoi apostasier? Qu’est-ce que ça amènerait de plus dans votre vie? En quoi je crois? Est-ce que j’ai besoin d’une communauté? Si oui, laquelle?

Bref, il y a autant de questions qu’il y a de situations de personnes voulant apostasier. Il vous fait vraiment définir pourquoi vous posez ce geste important.Certaines personnes diront qu’ils n’ont pas à expliquer le pourquoi et le comment de leur démarche à un clergé dont ils n’ont jamais voulu. Soit.

Cependant, c’est à ce clergé que vous aller demander une apostasie. Peut-être ne voulez-vous pas argumenter sur vos raisons, c’est possible. Cependant, dans une démarche saine et cohérente, il est toujours bon de dire pourquoi vous quittez cette Église.

Votre opinion est peut-être déjà toute faite, mais faites-la entendre, dites ce que vous avez à dire.

Comment apostasier?

Existe-t-il vraiment une seule manière d’apostasier? Voici quelques grandes lignes qui peuvent aider à comprendre ou à démarrer une démarche.

  • Définir les raisons pour lesquelles vous voulez apostasier. Essayer de les retourner sous tous les angles.
  • Contacter votre paroisse de baptême pour savoir à quel Archevêché elle appartient.
  • Écrire une lettre à l’Archevêché dans laquelle vous indiquez :
    • Votre nom
    • Votre paroisse de baptême
    • La date et l’année de votre baptême
    • Vous décrivez les raisons qui vous font abandonner l’Église catholique-romaine
    • Demandez une confirmation de votre demande
    • Datez et signez
  • Attendez une réponse (souvent trop longtemps à votre goût)
  • Lorsqu’on vous confirme le tout, vous pouvez contacter votre paroisse de baptême pour vérifier si l’annotation marginale a bel et bien été faite.

Des ressources?

Existe-t-il des ressources pour les gens voulant apostasier? Oui et non. Comme l’apostasie est souvent une idée découlant d’une démarche spirituelle, les ressources existantes sont plutôt de l’ordre de l’accompagnement spirituel.

Ces ressources d’accompagnement comme le centre Le pèlerin(formation) ou le centre Benoît-Lacroix sont des services offerts par des congrégations religieuses. Encore ici, bien des gens qui ont déjà pris la décision d’apostasier ne voudront pas d’un service offert par une congrégation religieuse.

Comme un dit souvent : Chat échaudé craint l’eau froide. Cependant, l’accompagnement, bien qu’il ne soit pas axé sur le fait d’apostasier, peut permettre d’éclaircir et de confronter les idées qui mèneraient peut-être à un acte d’apostasie. Les ressources sur internet vont vous faire aller directement sur le site des raéliens où vous pourrez remplir le fameux petit formulaire.

Selon moi, cette démarche reste très impersonnelle et je vous la déconseille si vous ne songez pas à devenir raélien. Dans cette démarche, tout ce que vous faites, c’est envoyer un formulaire typé « raëlien » pour signifier à l’Archevêché que les rangs de cette religion soucoupiste s’agrandit.

L’apostasie un acte irrévocable?

Tout dépend de la personne. L’apostasie est un acte qui devrait se passer en toute liberté. Liberté de continuer, mais aussi liberté d’avoir la possibilité de pouvoir revenir s’il y a lieu. En effet, le désir d’un retour dans une tradition religieuse n’est pas nécessairement garanti.

Qui peut prédire quels changements subira un être humain au cours de sa vie? Cependant, si le désir de retourner à l’Église se fait sentir, l’apostasié peut le faire. La porte reste ouverte, mais il devra entreprendre d’autres démarches pour réintégrer l’Église. (ex . : Cours de catéchèse etc.)

Dans l’au-delà

Une question peut se poser en ce qui concerne la personne qui a apostasié de sa foi catholique. Comme les cimetières sont considérés comme des sols sacrés… est-ce que cela complique les procédures d’inhumation pour la personne qui a renié la foi? Oui et non. C’est à dire que si on applique le dogme à la lettre, une personne qui a apostasié de la foi catholique ne devrait pas se faire inhumer dans une terre sacrée.

À ce propos, il fut un temps ou les personnes décédées à la suite d’un suicide étaient enterrées hors du cimetière et leur nom n’apparaissait pas dans les registres d’inhumation. Cependant, aujourd’hui, même si la terre d’un cimetière est considérée comme sacrée, on « ferme les yeux » et on inhume pareil.

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